Un jardin en santé mentale ?
Voilà bien une catégorie tellement vaste, tellement floue, qu’elle mérite encore plus qu’une autre qu’on soit ici très vigilants : quelles recommandations en effet alors qu’on ne sait même pas précisément de quelles personnes on parle, qui sont exactement les usagers de ce jardin, quels sont leurs troubles, leurs peurs, leurs désirs, etc. !
Une fois de plus, répétons-le : seules les personnes et les professionnels qui en prennent soin peuvent réellement adapter un jardin, partir des recommandations faites pour le « jardin universel », et les ajuster.
Tous les éléments dont nous avons parlé, facteurs d’expériences, d’observations, de bien-être, de rêveries comme d’activités, etc., peuvent profiter à toutes les personnes, quels que soient les troubles mentaux et leurs origines.
En revanche, comme certains de ces troubles peuvent provoquer des phénomènes particuliers, on veillera tout particulièrement :
- Au sentiment de sécurité, notamment par rapport à l’extérieur : le jardin doit être un endroit où l’on se sente en sûreté, protégé de ce que l’extérieur peut avoir de menaçant. (Rappel : on se basera sur le recours à des végétaux pour que ce qui clôture et permet le sentiment de sûreté ne provoque pas de sentiment d’enfermement.) ;
- À se montrer prudent sur les éléments, artistiques ou naturels, susceptibles de provoquer angoisses, malentendus, etc. (sculpture étrange, branches curieusement tordues, etc.) ;
- À bannir les objets ou éléments susceptibles de servir pour se blesser ou pour blesser d’autres personnes.
Des recommandations pour un jardin en santé mentale : vraiment ? On voit bien là pourquoi la pertinence de telles recommandations, ainsi abstraites, détachées de tout contexte, est assez discutable :
- d’une part, parce que les professionnels qui prennent soin de ces personnes les connaissent très bien ;
- d’autre part, parce qu’elles risquent de nourrir autant de clichés que de pensées intéressantes. Préciser par exemple qu’il faut éviter les objets qui peuvent blesser, qu’est-ce à dire : que ces personnes sont dangereuses ? Mais la très grande majorité des violences physiques, en France, sont commises hors lien avec une maladie mentale…
Mais alors, ne faudrait-il rien dire sur ces jardins ?
Parions que le plus intéressant qu’on puisse en dire sera ce qui en sera dit par les personnes qui les fréquentent, usagers ou professionnels, et qu’au fur et à mesure que ce site se développera, leur parole (dans le forum ou dans le répertoire des jardins) se fera plus présente.
En attendant, évoquons un dernier aspect :
Certains établissements, en Angleterre notamment, ont choisi de garder un jardin ouvert à tout public, avec tout ce qu’on peut trouver dans un jardin, y compris des éléments pouvant représenter un danger (étang par exemple). En revanche, les personnes de certains services de l’établissement ne peuvent y aller qu’accompagnées par un professionnel ou un bénévole (formé).
Choix intéressant. La liberté (d’être seul notamment) que permet un jardin où on peut aller seul, parce que sans aucun danger, est importante… mais un tel jardin n’est-il pas artificiel, ne crée-t-il pas un sentiment d’exclusion au côté du sentiment de sécurité ? Être toujours accompagné est réellement contraignant… mais ouvre un autre espace de liberté : celui d’être dans un espace « normal », celui de profiter d’un jardin offrant une plus grande variété d’émotions, d’expériences, de rencontres…
Voilà des questions, des débats, importants, que beaucoup d’établissements peuvent se poser. Sachant qu’il n’y a là, une fois de plus, pas de réponse ou de solution a priori. C’est à l’ensemble des personnes concernées par le jardin thérapeutique, au terme d’une démarche participative, de faire le choix qui aura le plus de sens en fonction du public, de leur contexte, de leur culture, etc.
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