Un jardin… collectif ou privé ?

Un jardin… collectif ou privé ?

Difficile de jeter l’ancre dans une institution quand on y débarque (et à plus forte raison quand on y est débarqué) pour y vivre de longues voire très longues périodes. Est-on chez soi ou chez les autres ? Et quels autres : les autres résidents ou les professionnels ? A l’intérieur, certaines personnes nous y aident (celles, par exemple, qui entrent dans notre chambre comme on entre dans un domicile privé : en s’annonçant et en attendant d’y être autorisé ; et qui n’y viennent pas en notre absence), d’autres pas du tout…

Et si le jardin de l’établissement, qui se pense d’abord comme un lieu collectif, pouvait pourtant nous aider à aider ceux qui ont besoin d’y trouver, d’y sentir, un chez soi ?

Quelques pistes à explorer :

L’une des royales, évoquée précisément ailleurs : transformer une partie au moins du jardin en jardin partagé, avec ses parcelles individuelles.

Plus simplement : voir avec chaque usager s’il souhaite être le jardinier tout particulier d’ : une parcelle, un lopin, un massif, un bac de plantation, une jardinière, etc.

Regarder aussi, évidemment, selon le type de construction, s’il existe des possibilités de jardinières, s’il existe des plantations possibles (en pots) sur les balcons des chambres, etc.

jardin alzheimer immeuble balcons - img

Là, comme dans un immeuble, cela permet à chacun de faire de son balcon son petit et proche “espace extérieur” bien à lui.

(Sans aller jusqu’à rêver que nos établissements de prendre-soin ressemblent à cet immeuble de Barcelone…

Quoique…)

Envisager tout ce qui touche aussi à l’individualisation et à la responsabilité : d’un animal, d’un dispositif pour les animaux (nichoir, mangeoire, hébergement pour insectes…), d’une plantation particulièrement à surveiller (certains arbustes et arbres les premières années, surtout en climat sec), etc. Cela permet également de nourrir la dimension “jardin de prendre-soin mutuel”.

Regarder également du côté des constructions, objets, oeuvres, etc. (depuis la barrière fabriquée avec quelques bambous jusqu’aux constructions végétales) : certain-e-s permettent de façon très forte à des usagers, en modifiant le jardin, de l’investir, de s’y inscrire, d’y jeter l’ancre.

Sachant que nous avons parlé là de modes assez actifs et qu’il ne faut pas négliger que pour certaines personnes, l’apprivoisement du jardin (voir l’encadré ci-dessous), la “familiarisation” du jardin, se fera juste parce qu’il y aura un lieu, un banc, un point de vue sur le paysage, etc., qui deviendra leur endroit. Un phénomène (et un espace – d’intimité, parfois d’intimité partagé) dont prendre tout particulièrement soin…

– Les hommes, dit le renard, ils ont des fusils et ils chassent. C’est bien gênant! Ils élèvent aussi des poules. C’est leur seul intérêt. Tu cherches des poules ?
– Non, dit le petit prince. Je cherche des amis. Qu’est-ce que signifie ” apprivoiser ” ?
– C’est une chose trop oubliée, dit le renard. Ça signifie ” créer des liens… “
– Créer des liens ?
– Bien sûr, dit le renard. Tu n’es encore pour moi , qu’un petit garçon tout semblable à cent mille petits garçons. Et je n’ai pas besoin de toi. Et tu n’as pas besoin de moi non plus. Je ne suis pour toi qu’un renard semblable à cent mille renards. Mais, si tu m’apprivoises, nous aurons besoin l’un de l’autre. Tu seras pour moi unique au monde. Je serai pour toi unique au monde…
– Je commence à comprendre, dit le petit prince. Il y a une fleur… je crois qu’elle m’a apprivoisé…
– C’est possible, dit le renard. On voit sur la Terre toutes sortes de choses…
– Oh! ce n’est pas sur la Terre, dit le petit prince. Le renard parut très intrigué :
– Sur une autre planète ?
– Oui.
– Il y a des chasseurs, sur cette planète-là ?
– Non.
– Ça, c’est intéressant! Et des poules ?
– Non.
– Rien n’est parfait, soupira le renard.

Extrait du Petit Prince, d’Antoine de Saint-Exupéry.

jardin de soin - collectif ou prive _simul et singulis
Simul et singulis : être ensemble et être soi-même (le dessin représente une ruche)

collectif ou privé – img – collectif ou privé ?

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